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10 May

Cérémonie de Commémoration de l'abolition de l'esclavage, le 10/05/2015

Publié par Ca.Ravages (Catherine GHEKIERE)

                                                  Cent ans de plus.  .  . MAKIRI MAKIRI d'après F.  CABREL

 

Oh ! Afrique, j’entends ta musique,

       D’abord, ce n’est qu’un son, impassible j’attends.

       J’attends qu’il m’envahisse et soudain il me prend.

       Sa musique me porte et m’emporte avec elle.

       Les yeux fermés, elle pénètre et chante à l’oreille.

Oh ! Afrique, j’entends ton cœur,

       C’est un son harmonieux, mélodieux, mélancolique,

       Le présage d’un texte aux couleurs dramatiques.

       Les tam-tam marquent le rythme cadencé de l’esclave     enchainé,

       Laissant défiler les images des horribles voyages du passé.

Oh ! Afrique, je sens ta douleur,

       Quand les paroles se collent à la musique qui déroule,

       Mon esprit autour s’enroule et je ne fais plus qu’un,

       Indifférente au monde qui m’entoure.

Oh ! Afrique, pays torturé !

       La narration portée par les sons, m’enveloppe, angoisse parfois !

       Mon corps tout entier se tend, frémissant au plaisir à l’émoi.

Oh ! Afrique, je vois ton sang !

       J’entends l’histoire, je la vis, je la souffre et jusqu’au bout j’en souffre.

       Elle m’emporte avec elle, elle m’émerveille,

       Eveille pour un temps tous mes sens avec elle.

       Les chants du chœur, pleins d’émotion,

       Font naitre en moi un grand frisson.

 

Oh ! Afrique, peuple des danses et du rythme !

        Je marche avec l’esclave et ses chaines qui le voûtent,

        Je baigne dans cette musique, cette bulle qui m’envoute.

Oh ! Afrique…….Cent ans déjà !!!

Go down Moses...

HISTOIRE - Peuples naufragés sans tombeaux dans le fracas des vaisseaux ; peuples, siècle après siècle suppliciés, dispersés, jetés au carrefour de tous les courants du monde ; peuples-souffrances, peuples-douleur pourtant toujours debout ! Oui, debout ! Car même au plus profond du néant, même marqués au fer rouge, même entassés au bord du gouffre, la solitude comme seule compagne, nous avons survécu ; survécus, le port altier bravant la désespérance; survécus, les yeux rivés sur un levant profusion de promesses de libertés : un jour, un jour, au-delà des collines et des vallées ; un jour, un jour, au bout des sentiers de pénitence ; un jour, l'arrivée au port : le miel, le lait, la liberté, la terre, la terre promise.

La terre. La terre, le temps où nous étions rois : rois de Djenné, rois de Kumbi Saleh, rois du Monomotapa. La terre, le temps où nous étions Mansa Moussa, Soundiata Keita, Ntare Rushatsi; la terre, le temps, le temps plus loin, plus loin que l'histoire... Et puis... et puis captures, arrachements, rapts, chaînes, processions; processions Bambara-Serere-Peuls-Malinkés- Ibo, processions gémissant de désespérance. Elimina, Ouidah, Cabinda, Malembo, Luanda, Quelimane, Inhambane, Gorée : la porte du non-retour. Olaudah Equiano: "J'arrivai au bord d'une grande rivière. On me plaça dans une pirogue et on commença à pagayer. La première chose que je vis en arrivant à la côte fut la mer et un navire négrier qui attendait son chargement."

Embarqués, embarqués pour l'inconnu. Traversée. Traversée des eaux à fond de cales, traversée entassés, enchaînés; traversée et vomissures ; traversée et déjections ; l'océan comme fosse commune.

Débarquement. Port de Charleston, port de Veracruz, port de Cartagena, Kingston port, porto da Bahia, porto da Rio de Janeiro, puerto de Cuba, puerto de Santo Domingo. L'ordre, les mêmes ordres : les hommes d'un côté, les femmes de l'autre, les enfants par ici. Bois d'ébène. Bois d'ébène venus d'Angola, venus du Congo, venus du Ghana. Vente. Vente aux enchères. Séparation, dispersions, plantations. Du lever au coucher du soleil : champs de canne à sucre et de coton. Et les claquements de fouets. Et le fouet du maître, et à chaque coup, un morceau de peau arraché. Marley: "Chaque fois que j'entends un claquement de fouet mon sang se glace car je me souviens..."

Proclamations, proclamations: "Le nègre fugitif rattrapé aura une oreille coupée ; le nègre fugitif récidiviste aura un jarret coupé ; le nègre fugitif une fois, fugitif deux fois, sera pendu à la troisième désertion." Mutilations, castrations, lynchages. Combien, combien de siècles l'invivable? Et les cris, les cris de douleur, et les lamentations, les lamentations les mains levées vers le ciel: "Dieu, Dieu, si tu existes, pourquoi ? Oui ? Pourquoi ?" Les lamentations : "Dieu, Dieu, le fardeau de nos péchés est-il si lourd ? Dieu, Dieu, pourquoi ? Oui, pourquoi Dieu?"
Combien, combien de siècles l'enfer? Et pourtant tenir, tenir et le sourire large, chanter le blues pour ne pas crever de chagrin : la mémoire Shango, la mémoire Loa et Lukumi, chanter, chanter Moïse en espérant la délivrance!

Go down Moses Way down in Egypt land Tell old pharaoh to Let my people go!

Descend Moïse va dans ce pays d'Egypte

Demande au vieux Pharaon de laisser partir mon peuple.


Tenir, survivre ! Survivre, le rhum rallumant la mémoire Congo, la mémoire Abomey, la mémoire Bornou; survivre la mémoire flottant dans les rêves et retraverser l'Océan, tantôt Exu sorcier guérisseur, ouvrant la porte aux vivants et à ceux qui sont déjà partis de l'autre côté; tantôt Ogum Dieu de la guerre parcourant le monde pour traquer l'injustice; tantôt Oxum déesse de l'élégance et du faste, la danse toujours sensuelle, invitant à l'amour.

Survivre. Etre l'homme au corps démembré, l'homme écrasé, méprisé, chargé comme mauvais sang; être l'homme-nègre passé par tous les destins qui ne renoncera jamais car renoncer à l'espérance c'est mourir. Survivre et qu'importe la fureur de la foule qui lynche, et qu'importe les cordes, et qu'importe les bûchers du Klan ne pas tomber face contre terre.

Survivre, résister. Marronnages et des voix qui s'élèvent: Toussaint Louverture, Zumbi de Palmarès, Harriett Tubman, Frederik Douglas, le chef Boni, Nat Turner, Makandal, Victor Schœlcher...

Survivre et avec Dizzy, Bird et Monk, le pas sur le tempo de Satchmo, s'élever jusqu'au cosmos, ramasser les étoiles, et la batterie en furie restructurant la métaphysique de la vie avec Max Roach, portés jusqu'à l'extase par les vibrations de Coltrane et Coleman, les rimes marquées par le soleil secrété par les saxos de Sonny Rolling et la trompette de Miles, rêver qu'un jour, un jour... "Et j'ai vu la Terre promise. Il se peut que je n'y pénètre pas avec vous. Mais je veux vous faire savoir, ce soir, que notre peuple atteindra la Terre promise".

Nouveau levé du jour sur la terre : des mains noires et des mains blanches entremêlées, écho des veillés d'un rêve lointain : Obama Président. La terre élevée au rêve que nous avions rêvé avec le King : "Eh bien, je ne sais pas ce qui va arriver maintenant. Nous avons devant nous des journées difficiles. Mais peu m'importe ce qui va m'arriver maintenant, car je suis allé jusqu'au sommet de la montagne. Je ne m'inquiète plus. Comme tout le monde, je voudrais vivre longtemps. La longévité a son prix. Mais je ne m'en soucie guère maintenant. Je veux simplement que la volonté de Dieu soit faite. Et il m'a permis d'atteindre le sommet de la montagne. J'ai regardé autour de moi. Et j'ai vu la Terre promise. Il se peut que je n'y pénètre pas avec vous. Mais je veux vous faire savoir, ce soir, que notre peuple atteindra la Terre promise".

Obama Président : un Noir à la Maison blanche. Et voilà le monde saisi, envahi, transporté... Et puis... bang, bang, bang... Ramarley Graham, bang, bang, bang! Tarika Wilson, bang, bang, bang! Oscar Grant, Kathryn Johnston, Andy Lopez, bang, bang, bang! Sean Bell, Mickael Brown, Trayvon Martin,Tamir Rice, bang, bang, bang! Et Garner... Eric Garner suppliant: "J'étouffe, j'étouffe, je ne peux plus respirer ! J'étouffe !"

C'est que... c'est que de Ferguson à Baltimore, la couleur de la peau sépare encore; c'est que de Rio à Bogota, de Cartagena à Medellin, la couleur de la peau ordonne, compartimente, organise encore la vie; c'est que la surface de la peau est parfois, souvent, encore ce lieu de vie et de mort.

C'est que chaque jour, il faut recommencer... C'est que chaque jour, il faut toujours recommencer, toujours se remettre debout et marcher... Ne l'oublions pas.

 

David Gakunzi

Directeur du Paris Global Forum

Cérémonie de Commémoration de l'abolition de l'esclavage, le 10/05/2015
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