Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

suivez moi sur la page Catherine.Events

09 Oct

Edwy PENEL à la MCA d'Amiens pour la sortie de son livre "pour les musulmans"

Publié par Ca.Ravages (Catherine GHEKIERE)

« "Il y a un problème de l'islam en France", n'hésite pas à proclamer un académicien, regrettant même "que l'on abandonne ce souci de civilisation au Front national". À cette banalisation intellectuelle d'un discours semblable à celui qui, avant la catastrophe européenne, affirmait l'existence d'un "problème juif" en France, ce livre répond en prenant le parti de nos compatriotes d'origine, de culture ou de croyance musulmanes contre ceux qui les érigent en boucs émissaires de nos inquiétudes et de nos incertitudes. L'enjeu n'est pas seulement de solidarité mais de fidélité. Pour les musulmans donc, comme l'on écrirait pour les juifs, pour les Noirs et pour les Roms, ou, tout simplement, pour la France.»
Edwy Plenel

Pour les musulmans - Edwy PLENEL - Éditions La Découverte

EDITIONSLADECOUVERTE.FR

"Mon livre c'est un appel à ce que nous ayons l'imaginaire de ce que nous sommes, un pays multiculturel, un appel à ce que nous fermions ces querelles qui ciblent et dont les premiers boucs émissaires sont nos compatriotes de culture, d'origine et de croyance musulmanes, que nous leur tendons la main."

"J'ai fait ce livre car je pense que nos voix manquent aux musulmans, je ne l'ai pas fait pour vous faire parler, je l'ai fait pour parler contre, contre la peur, contre la haine.

C'est un acte pour rompre le silence qui accompagne tout cela. je ne suis pas un porte parole."

Edwy PENEL à la MCA d'Amiens pour la sortie de son livre "pour les musulmans"
Edwy PENEL à la MCA d'Amiens pour la sortie de son livre "pour les musulmans"
Edwy PENEL à la MCA d'Amiens pour la sortie de son livre "pour les musulmans"
Edwy PENEL à la MCA d'Amiens pour la sortie de son livre "pour les musulmans"

«Toutes les civilisations ne se valent pas»,déclarait en 2012 Claude Guéant, ministre de l’Intérieur. Cet été, Manuel Valls s’interrogeait sur la compatibilité de l’islam avec la démocratie. Pour Edwy Plenel, directeur de Mediapart, cette banalisation de discours xénophobes au plus haut sommet de l’Etat alimente une «guerre des civilisations». Son dernier livre Pour les musulmans est un plaidoyer pour les minorités, une réponse aux Alain Finkielkraut et autre Eric Zemmour.

Depuis trente ans, on veut nous faire croire que les musulmans, pris en bloc alors qu’ils sont divers, d’origine, de culture ou de croyance, sont la cause de tous nos maux : du chômage, de la crise économique ou de l’insécurité de nos quartiers. Ce livre est un cri d’alarme pour la France, pour les minorités, pour dire que nous n’acceptons pas ça. Nos compatriotes musulmans ne sont en rien comptables de crimes perpétrés par des mouvements totalitaires se revendiquant abusivement de l’islam. De plus, les premières victimes de ce terrorisme, ce sont d’abord des musulmans, en Irak, en Syrie, qui vivent depuis des années avec le spectacle de têtes coupées et de corps éventrés. Enfin, nous en sommes là aujourd’hui, avec l’Etat islamique, à cause des guerres successives engagées par les puissances occidentales dans la région qui ont produit ce monstre totalitaire. Ceux qui demandent aux musulmans d’être comptables de ce qui se passe en Irak devraient se souvenir que, dans les années 80, l’Occident armait, jusqu’aux armes chimiques, le dictateur Saddam Hussein en brandissant l’épouvantail de la révolution iranienne. Dans un article publié dans le Figaro le 16 mai 1896, intitulé «Pour les juifs», Emile Zola écrivait : «A force de montrer au peuple un épouvantail, on crée le monstre réel.» Cela vaut pour les musulmans aujourd’hui.

Je ne le crois pas. Ce mot repris dans toute la presse nous empêche de penser. Il y a des crimes monstrueux, nous sommes tous pour les combattre mais nous devons chercher à en comprendre les causes, ce qui ne veut pas dire les excuser. Chacun est le barbare de l’autre. Montaigne qui écrivait aux temps de guerres de religion disait que chacun trouve barbare ce qui n’est pas de sa coutume.

Je ne crois pas à la réalité de ce sentiment. Ce que vous décrivez là renvoie plutôt au piétinement de la question sociale et démocratique, et les médias n’ont pas à accompagner cette logique de stigmatisation en faisant parler le peuple à sa place.

Arrêtons d’alimenter ce fantasme. C’est un discours idéologique fait par des propagandistes qui veulent nous entraîner dans une guerre de tous contre tous, de la France contre elle-même, en ethnicisant et en islamisant la question sociale. Ce que je constate, c’est un mouvement de laïcisation de toutes les religions y compris les musulmans de France. Nous sommes une Amérique de l’Europe, acceptons d’en avoir l’imaginaire au lieu de monter une communauté contre l’autre, de monter une identité contre l’autre.

La laïcité originelle n’est pas ce laïcisme sectaire qui est à la laïcité ce que l’intégrisme est aux religions et qui est aujourd’hui le cheval de Troie de la banalisation de la xénophobie et du racisme par nos élites, permettant la notabilisation de l’extrême droite. La laïcité est aujourd’hui comprise comme le refus des religions et notamment des religions minoritaires, alors que la loi de 1905 affirme tout le contraire. A l’époque, les Républicains ont mis fin au face à face mortifère entre le catholicisme et la République pour mettre en place un pluriel, une loi de séparation des Eglises et de l’Etat. Ils donnent ainsi droit de cité au protestantisme et au judaïsme tout en ouvrant un chemin de laïcisation aux catholiques qui, contre la hiérarchie catholique, permettra l’affirmation du catholicisme social. De la même façon, notre pays doit donner droit de cité aux musulmans dans la diversité de ce que le mot recouvre. Le peuple français n’est pas plus raciste qu’un autre. Aujourd’hui, nous sommes en train de mettre une partie de notre peuple en guerre contre l’autre et cela sert le jeu des puissants.

J’ai grandi dans les Caraïbes, puis en Algérie, je suis arrivé en France à 18 ans, je n’avais pas les codes, j’ai détesté l’atmosphère sociale à Sciences Po, j’ai dû m’intégrer. On doit tous s’intégrer à un moment ou à un autre. Mais l’assimilation est une injonction à l’effacement pour se plier à une norme majoritaire. Nous sommes pluriels, le monde à venir est un imaginaire de la relation. Edouard Glissant écrivait :«Je peux changer en échangeant avec l’autre sans me perdre pour autant ni me dénaturer.» Les racistes cherchent à nous immobiliser, à nous rendre dépendant de notre origine, de notre naissance. Or, la promesse de la République, c’est le mouvement, c’est cette égalité des droits et des possibles.

Au nom de la sécurité, cette loi porte atteinte aux droits fondamentaux de tous par des restrictions qui visent notamment l’espace public numérique. Elle porte atteinte à la liberté d’expression en sortant des délits d’opinion de la loi sur la presse, et en les aggravant s’ils sont commis sur Internet. Il ne faut pas confondre propagande et crime. Une démocratie doit rester froide face au terrorisme, c’est une affaire de police, de renseignement. Nous sommes une société ouverte et il y aura peut-être hélas des attentats qui nous frapperont, mais nous ne devons pas mettre en péril ce qui est le socle de la démocratie parce qu’il y a cette menace. Ce serait le meilleur service à rendre à ceux qui veulent nous terroriser.

C’est un imaginaire démocratique. Il aura fallu deux guerres mondiales et un crime contre l’humanité pour que l’on inscrive la notion d’égalité dans la Constitution et dire qu’en République, il n’y a pas de distinction d’origine, de race et de croyance. Il faut travailler à ce programme soit respecté. Derrière toutes ces exacerbations identitaires et religieuses, ce que l’on veut effacer, c’est le peuple. Si on rejette le peuple, il se venge et produit des monstres, soit des monstres terroristes qui sont des enfants perdus de nos quartiers déshérités, soit des monstres politiques avec des valeurs de haine et d’exclusion qui peuvent porter atteinte à nos valeurs démocratiques.

Commenter cet article

À propos

suivez moi sur la page Catherine.Events